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C’est déroutant d’attendre la sortie d’un jeu avec impatience, de lire des tests confirmant mes espérances, le qualifiant parfois de meilleurs FPS de tous les temps, puis d’y jouer et, finalement, en tant que fan de FPS, de ne pas y trouver mon compte. C’est d’autant plus perturbant quand aucun journaliste n’évoque les défauts qui me sautent à la figure. A se demander si NoFrag n’est pas devenu une sorte d’OVNI du web, dernier bastion d’une race de joueurs en voie d’extinction qui s’adonnent aux FPS pour l’amour du combat, la sauvagerie de l’affrontement, le stress, l’adrénaline, le goût du sang… [–SUITE–]

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Dans les années 60, l’avion du héros se crashe en pleine mer. Après quelques brasses, il découvre au fond de l’océan Rapture, une mystérieuse cité bâtie sur un modèle utopiste où l’intérêt personnel prime sur tout le reste. Mais il y a quelques temps, suite à la découverte de l’Adam, une substance rare capable de faire évoluer les hommes, l’utopie tourne mal et Rapture se transforme en une cité grouillante de monstrueux humains génétiquement modifiés assoiffés d’Adam. Bienvenue à Rapture !

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Bioshock est constitué d’une dizaine de cartes s’enchainant de façon linéaire. Il est parfois possible de revenir sur un ancien niveau, mais vous n’y verrez sans doute aucun intérêt. Selon votre style de jeu, vous arriverez au bout de l’aventure en 15 à 30 heures ce qui est représente une durée de vie deux fois supérieure à la moyenne des FPS.

Au début de chaque map, votre contact radio vous assigne une mission qui consiste en général à aller chercher un objet en A puis à l’apporter en B. Dans le jargon des game designers, on appelle ça une quête Fedex. Les cartes sont constituées de 30 à 50 pièces connectées entre elles par des couloirs. Elles contiennent plusieurs points névralgiques d’où il est possible d’atteindre trois ou quatre destinations différentes.

Les ennemis sont répartis en petits groupes généralement constitues de deux à trois individus. Une fois abattus, ils réapparaissent un peu au hasard, mais ils sont alors moins nombreux.

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Il n’est pas nécessaire de traverser toutes les pièces pour atteindre votre objectif. Si vous vous contentez d’accomplir les missions qui vous sont assignées, vous ne verrez sans doute pas plus des deux tiers du jeu. D’ailleurs, l’intérêt de Bioshock consiste essentiellement à visiter Rapture, ceci pour trois raisons :

  1. Le plaisir contemplatif : vous vous émerveillerez de la qualité du travail artistique réalisé par l’équipe d’Irrational. Regardez les screenshots et imaginez-vous qu’en mouvement c’est encore plus impressionnant.
  2. La découverte du scénario : il est raconté au travers de magnétophones sur lesquels les principaux habitants de Rapture ont enregistré leurs mémoires. C’est exactement le même système narratif que celui de Doom 3 ou FEAR. Outre son incohérence, on peut lui reprocher de dissocier le gameplay du scénario : on ne vit pas l’histoire, on l’écoute sur un magnétophone.
  3. Le butin : c’est en fouillant les poubelles, les placards et les cadavres que vous amasserez de l’argent et de l’équipement. S’il est jouissif de découvrir un chargeur complet ou une liasse de billets au début du jeu, on se lassera rapidement d’examiner chaque objet, surtout que vous ne trouverez que des balles, des soins et de l’argent, mais jamais d’équipements rares qui auraient pu rendre le système un peu plus gratifiant.
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Pour en revenir aux objectifs qui vous sont assignés, leur réalisation en elle-même n’a guère d’intérêt, rappelons qu’il s’agit neuf fois sur dix de quêtes Fedex. Ils permettent par contre de débloquer la suite du jeu et de dévoiler la trame principale de l’histoire. Le scénario n’a rien d’exceptionnel, mais les thèmes qui y sont abordés sont originaux et surprenants.

Ils traitent essentiellement de la philosophie objectiviste et de la nature humaine : le libre arbitre, l’esthétisme, l’extrémisme, les valeurs morales, l’identité… A l’issu de certaines scènes, on se surprend à prendre du recul et à réfléchir sur ce qui vient de se dérouler à l’écran. Chose rare et précieuse dans le monde du jeu vidéo.

J’ai adoré m’immerger dans l’ambiance très particulière de Bioshock : explorer un univers fabuleux, découvrir des décors à couper le souffle, suivre avec intérêt une histoire souvent surprenante, parfois même un peu dérangeante. En résumé, j’ai aimé le côté aventure du jeu. A tel point qu’au final, j’ai commencé à considérer que toute la partie action, et en particulier les combats, était devenue un frein à mon exploration et donc à ma principale source jouissance. Explications :

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Chaque carte contient une cinquantaine d’appareils qu’il est possible de pirater. Le hacking rend le jeu bien plus facile, car il permet d’une part d’acheter des munitions et des soins à ne plus savoir qu’en faire, et d’autre part il fait en sorte que les tourelles et les robots de sécurité s’en prennent à vos adversaires. Le deuxième point est particulièrement utile pour lutter contre les ennemis qui respawnent. Pour hacker un appareil, vous devez réussir un minijeu proche de Pipemania.

Le problème, c’est que si vous aviez l’occasion de jouer à ce minijeu sur un site web en flash, il est probable que vous en lasseriez au bout de trois parties. Le problème, c’est que chaque carte contient une cinquantaine d’appareils à hacker. Le problème, c’est que vous avez le choix entre vous taper un minijeu ultra répétitif ou galérer pour vous fournir en munitions et en soins au milieu d’ennemis qui respawnent. En résumé, vous ne choisirez pas ce qui est le plus fun, mais ce que vous considérez comme étant le moins rébarbatif.

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Bioshock propose un arsenal constitué d’armes et de plasmides. Les plasmides sont des pouvoirs permettant d’enflammer vos adversaires, de les électrocuter, de les faire se battre ensemble, de vous rendre invisible, etc. Les armes n’ont aucune originalité, mais une fois combinées avec les plasmides elles offrent un gameplay très complexe. Il est possible de créer des pièges à base de télékinésie, d’électricité et de mines, ou d’adopter une attitude très agressive en augmentant votre résistance, en paralysant vos cibles, puis en les criblant de projectiles. D’ailleurs, si vous fréquentez quelques forums, vous trouverez de nombreux threads traitant des combinaisons et des tactiques imaginables grâce à la richesse des moyens offensifs mis à votre disposition.

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Mais là encore, le gameplay pose certains problèmes. Premier hic, il y a très peu d’ennemis différents et vous les aurez tous croisés après les deux ou trois premiers niveaux. Même souci pour les armes et les plasmides : s’il est possible de les améliorer tout au long du jeu, vous aurez accès à l’essentiel d’entre eux très tôt. En caricaturant un peu, on pourrait dire que vous aurez fait le tour des ennemis et de l’arsenal après seulement trois ou quatre heures. Ensuite, si vous ne souhaitez pas que les combats deviennent trop répétitifs, libre à vous de varier le gameplay en essayant plusieurs combinaisons d’armes et de plasmides ou en vous amusant avec les éléments du décor : le jeu se transforme alors en un vaste bac à sable permettant toutes sortes d’expérimentations. Par contre, en ce qui concerne la sauvagerie de l’affrontement, le stress, l’adrénaline et le goût du sang, c’est raté ! Même les Protecteurs, les ennemis les plus puissants, peuvent être terrassés avec une incroyable facilité si vous exploitez certaines combinaisons.

Bioshock n’a pas été conçu pour mettre au défi votre capacité de survie, vos réflexes et votre volonté, mais pour vous permettre de réaliser des expériences dans un environnement offrant un minimum de frustration où même la mort n’est pas irrévocable : la difficulté générale est extrêmement basse, les ennemis qui respawnent sont une source intarissable de cobayes, les distributeurs automatiques fournissent des consommables à profusion, et même si vous mourez, vous réapparaitrez à quelques dizaines de secondes de l’action avec tout votre matériel dans une « Vita-Chamber ».

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Ces « Vita-Chambers » ont un effet assez pervers sur le jeu. Dans un FPS traditionnel, la mort peut être considérée comme une punition qui vous force à recommencer un combat jusqu’à ce que vous soyez suffisamment habile pour en venir à bout. Si le jeu est bien conçu, le sentiment d’accomplissement que vous en tirerez sera proportionnel à la frustration que vous aurez subie. Dans Bioshock, la mort est aussi une punition car elle vous force à perdre 10-20 secondes pour rejoindre l’action, par contre elle n’offre aucune gratification en échange. Beaucoup de joueurs préfèrent donc ne jamais utiliser les « Vita-Chambers » et se rabattre sur les quick-saves.

Mais la tentation est grande de sombrer dans la solution de facilité, et quand on y a goûté, il est toujours difficile de faire demi-tour, un peu comme lorsqu’on découvre un cheatcode et qu’on ne peut s’empêcher de s’en servir alors qu’il nous gâche totalement l’expérience de jeu. C’est d’autant plus tentant que les ennemis sont tous identiques, qu’ils respawnent et qu’ils deviennent de plus en plus coriaces à tuer. Non pas qu’ils soient plus habiles ou plus agressifs, mais simplement parce que leurs points de vie augmentent d’une façon démesurée (et totalement inexpliquée) tout au long de l’aventure. Ainsi, pour tuer un ennemi basique, il faut environ cinq balles de mitrailleuses au début du jeu et une vingtaine à la fin.

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Si vous jouez au niveau le plus difficile, vous risquez d’éprouver une certaine lassitude à devoir vider plusieurs chargeurs sur des monstres que vous connaissez par coeur et qui ne représente aucun challenge. Il est possible de contrer l’accroissement de la résistance des ennemis en boostant vos armes, vos plasmides et surtout en photographiant vos adversaires. Chaque cliché fait progresser vos recherches, dévoilant les points faibles des cibles et vous donnant des bonus aux dommages très importants. Mais là encore, il y a un problème : prendre des photos n’est pas amusant, c’est une tache répétitive ne demandant aucune compétence particulière. Sur plusieurs forums, vous pourrez lire que des joueurs rechignent à recommencer le jeu, car ils appréhendent de devoir refaire des centaines de clichés. Le choix est simple : soit vous combattez des ennemis ultras résistants dans des combats à n’en plus finir, soit vous vous résignez à faire des photos encore et toujours bien que la tâche soit rébarbative.

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Les jeux vidéo ne sont pas des machines à laver qu’on peut tester et noter selon des critères universels, mais il est sûr que si nous devions donner une note à Bioshock ce ne serait pas un 10/10. Le jeu souffre de nombreux défauts qu’on ne peut nier à moins d’aimer fouiller des milliers d’objets contenant tous la même chose ou de prendre son pied sur le minijeu dramatiquement répétitif qui permet de pirater les appareils de Rapture.

L’ambiance visuelle des décors et les thèmes abordés dans l’histoire sont remarquables, et rien que pour ça, Bioshock est une expérience rare qui vaut la peine d’être vécue. Par contre, le gameplay tend à transformer le jeu en un grand bac à sable où il est permis de réaliser toute sorte d’expérimentations sans trop prendre de risque. Quand on fait partie de ces petits garçons qui se contentent de piétiner un château de sable pour le détruire plutôt que de le bombarder de cailloux, de creuser des galeries sous ses fondations, ou de verser de l’eau dessus, malheureusement, on se lasse vite, surtout quand personne ne cherche à vous casser la gueule pour avoir détruit l’édifice.

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