2003 04 28 logoDevastation? vous lisez les diverses annonces et previews, et vous captez « moteur Unreal modifié », « moteur physique avancé », « campagne solo avec gestion d’une équipe de coéquipiers », etc… Que de promesses ! Mais personne n’avait pensé à citer la principale qualité de Devastation : vous rendre lucide et critique. Un jeu pourri, même bien habillé, reste un jeu pourri, pas la peine d’insister (rappelez vous Unreal 2). Mais j’ai insisté. Que de temps perdu.
[–SUITE–]

Eminem, ce héros des temps modernes

Dans Devastation, on n’a pas trop voulu forcer sur le scénario : le futur est moche, très moche, contrôlé par des méchants pas gentils. C’est le chaos, les villes et leurs rues sont comme des décharges publiques tant les ruines sont présentes. Vous êtes Ze Rebel, et bientôt le membre d’un groupe de rebelles qui ne veut pas « de ça ». Ze Rebel est présenté sous les traits d’une sorte de clone de Eminem, le rappeur débilo-crétin, qui visiblement a peu de charisme sur ses team-mates, tant ceux-ci font ce qu’ils veulent, c’est-à-dire… n’importe quoi.

Une I.A ne se développe pas après une biture

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L’homme à la chaise invisible

En effet, l’une des principales caractéristiques de Devastation est le fait de pouvoir gérer une équipe de co-équipiers, tout le long de la campagne solo, qui compte 21 missions. Vous aurez en général 4 équipiers avec vous, auxquels vous pourrez donner, individuellement ou globalement, 4 ordres distincts : Hold, Attack, Defend, Follow. En général, si un équipier meurt, la mission prend fin. Ne jamais oublier ce « détail », tant les équipiers… savent être bêtes.

Car le problème est bien qu’ils font plus ou moins n’importe quoi, et quand ils font ce qu’on demande, ils le font souvent très mal. « Attack » ! Et voilà Raoul et Ginette qui partent se faire trucider comme des bleus en ratant systématiquement leurs cibles. « Defend » ! Ils vous regardent comme des cons, en se comportant comme des tables si vous vous faites tirer dessus : 5 secondes de réflexion, puis rafales moitié sur l’ennemi, et moitié à travers le mur, fait de 50 cm de brique et béton. Seule une roquette anti-char passerait. Vraiment chouette cette équipe. Ah… j’ai été méchant : les équipiers savent très bien faire *un* truc : vous gêner. Une impasse, ils vous suivent : attention danger ! Il va *vraiment* falloir insister pour ressortir de cette impasse, tant ces carpo-thons ne savent que vous observer de leur regard de poisson mort sans se déplacer d’un pouce.

Une campagne bien trop linéaire

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C’est avec ces branquignoles que vous allez changer le monde

Graphiquement, Devastation est très honorable. L’environnement « rues bordéliques, chantier omniprésent, ruines » est bien rendu, avec moult détails, et pas mal d’effets ici et là, en tous cas suffisamment variés pour ne jamais avoir trop l’impression de visiter les mêmes lieux. La conception des niveaux est également pas mal travaillée : vous allez et venez dans des bâtiments délabrés, en traversant rues et passerelles. Malheureusement, la campagne étant ultra-linéaire, même lorsque vous croisez dix portes, une seule d’entre elles pourra être ouverte. Du reste, en général, elle sera *déjà* ouverte. Pas la peine de se poser de question. Il faut avancer, et avancer encore, dans la direction indiquée par votre radar. Pas de route alternative, sauf peut-être une pièce « planquée » qui cache quelques medikits de plus. C’est vraiment dommage d’avoir autant de linéarité, mais j’imagine que le boulot des level designers aurait alors été multiplié par 3.

Dommage

« Dommage » est le mot qui vous reviendra le plus souvent en jouant à Devastation. Les développeurs étaient visiblement pleins de bonnes intentions, appuyés par des artistes qui ont fait ce qu’ils ont pu. Le résultat oscille malheureusement entre le moyen et le mauvais, à tous les niveaux. Il y a toujours quelque chose qui cloche, qui ne semble pas fini, ou totalement buggé, sinon mal exploité. Ça finit par devenir ennuyeux, sans compter qu’à aucun moment on ne se sent « embarqué » dans cette histoire de rebelles minables.

Un moteur physique ne se développe pas après une orgie

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L’attaque des village people pneumopathiques

Autre caractéristique notable du jeu : le moteur physique. Il est présent, bien présent, trop présent, ridiculement présent : la plupart des objets peuplant le décor peuvent être déplacés, poussés, jetés, cassés. Bonne idée à la base. Malheureusement, là encore, le résultat est souvent catastrophique, la faute sans doute à pas mal de bugs. D’abord, cette caractéristique ne sert en rien le gameplay (sauf les très rares cas où on cherche à l’exploiter), mais surtout, elle finit par gêner, tant le déplacement irrationnel de certains objets réussit parfois à vous pourrir la vie ; sauf dans certains cas où vous rirez quand vous verrez un bidon franchir un mur après lui avoir tiré dessus au pistolet ; oui je suis sérieux.

Devastation : les bugs ont gagné

Ainsi, même si graphiquement Devastation est honorable, sur tout le reste, il est… moisi. Pas pourri, juste moisi. La faute à trop de bugs, au point de rendre la progression pénible, et finalement inutile, tant ça devient ridicule :

  • tiens, mes co-équipiers tirent à travers les murs ?
  • ohhhh ce poisson qui flotte au dessus de l’eau
  • bah pourquoi cet ennemi reste immobile à 3 mètres de moi, tout en me regardant ?
  • curieuses ces caisses et ces chaises qui flottent dans la pièce
  • bizarre ça, ces ennemis qui respawnent par magie

Le respawn scénarisé !

Tiens, en parlant de respawn. Devastation fait le tour de force de scénariser le respawn des ennemis. Attention hein, il y a bien du respawn injustifié (à la Project IGI 1), genre vous revenez sur vos pas dans une pièce précédemment nettoyée, et hop, 3 nouveaux ennemis sont là. Mais… vous vous souvenez de Gauntlet, cet antique jeu d’arcade, avec ses points de respawn qu’il fallait détruire ? Bah voilà, le gros hat-trick de Devastation, c’est ça : les méchants on trouvé le moyen de fabriquer des machines qui clonent des soltats à la vitesse grand V. Et la plupart des « fins de missions » consisteront à détruire ces machines à respawn. Désopilant.

La progression elle-même, au cours des missions, est proche de Doom l’ancêtre : des hordes d’ennemis déboulent, vous avancez et vous trouvez ici et là des munitions (les armes des ennemis abattus), et des medikits. En général, plus la zone sera difficile à passer, plus les medikits seront gros et nombreux. On revient 10 ans en arrière niveau gameplay. Pas mal. Non pas que je sois contre ce type de gameplay : j’aime beaucoup Serious Sam, et j’attends impatiemment de voir ce que va donner Will Rock. Sauf que Devastation affiche clairement d’autres prétentions. Et le sérieux, sans aucun second degré, de cette campagne solo, ne correspond pas du tout au déluge d’ennemis façon Serious Sam. La conception des niveaux et les hotspots avec les ennemis sont plus proches d’un NOLF 1 ou 2. Or, il faudra totalement oublier toute approche « infiltration » : les ennemis peuvent parfois vous voir à 50 mètres, alors que crouchez derrière une caisse façon CS. D’autres fois, vous vous tenez debout devant un ennemi à 3 mètres, et il ne bouge pas (tant que vous ne lui tirez pas dessus). Difficile de ressentir une quelconque « immersion » dans ces conditions.

Des armes en bois, des persos en carton

Rien ne rattrape le jeu. Techniquement, alors que l’aspect graphique est plutôt pas mal, tout le reste est à jeter : la modélisation et l’animation des persos date de la génération précédente, et les sons sont à pleurer. Devastation utilise le ragdoll « brut de fonderie » : le résultat est prévisible, et donc ridicule. Si les cadavres savent bien « tomber » lorsque vous les éliminez en hauteur, ils savent aussi se retrouver dans des positions impossibles dans 90% des cas, façon poupée désarticulée. A quoi bon utiliser le ragdoll si c’est pour obtenir un résultat totalement non crédible ?

Question son, c’est également le même genre de constat. Vous vous souvenez du bruit des carabines des fêtes foraines ? Je pense que le responsable du son a pris ses samples pendant ces fêtes. Pas possible autrement. Dans le même genre, le râle que vous faites lorsque vous sautez est digne d’un son Amstrad CPC64. Non, je n’exagère pas. C’est consternant. Cela dit, ce n’est pas trop cet aspect qui plombe le jeu.

Devastation propose aussi des modes multi-joueurs, mais je n’ai pas pris le temps de les essayer. Cela dit, je vois mal quels pourraient être leurs intérêts vue l’offre pléthorique du marché des FPS en ce moment, et ce dans tous les styles. Mais vue la qualité de la campagne solo, je ne parierais pas un brouzouf sur le jeu multi.

Certaines maps sont assez belles, d’autres moins… vraiment moins
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Conclusion : non merci

Bref, en conclusion, n’achetez pas ce jeu, ne perdez même pas 1 heure à essayer une version « qui passerait par là ». Vous perdriez votre temps et votre argent. Vous voulez un bon FPS avec une chouette campagne solo ? Dans plein de styles différents, essayez plutôt l’excellent NOLF 2, le sympa Raven Shield, ou pourquoi pas le gratifiant IGI 2, voire même l’ahurissant Postal 2 (qui mérite bien 1 ou 2 heures de jeu, qu’on aime ou qu’on n’aime pas). Mais surtout, surtout, évitez de perdre votre temps avec Devastation.

Les plus :

  • Sympa graphiquement
  • Level design travaillé

Les moins :

  • Campagne solo ultra linéaire
  • IA développée en 3 heures
  • Gameplay datant d’un autre age : tuer / se soigner + respawns infinis
  • Moisi par une colonie de bugs
  • Son, Animations, et Ragdoll mauvais

Testé et noté chez :

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