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La semaine dernière, je me suis rendu à Paris pour tester STRAFE, le FPS old-school développé par Pixel Titans et édité par Devolver Digital. La volonté des développeurs est résolument simple : garder tout ce qui est le plus fun dans DOOM et Quake et ajouter une couche de rogue-lite par dessus, avec des niveaux générés de façon procédurale, des items aléatoires, un système de shop et un boss final. Annoncé il y a deux ans, le jeu se rapproche à grands pas de sa sortie, calée au 28 mars. J’ai donc pu jouer à une version relativement définitive… mais encore une fois amputée des deux derniers mondes. Ah, et pas vraiment stable.

Bonne nouvelle : ma session de jeu a duré environ deux heures, ce qui m’a laissé l’opportunité de constater ce que STRAFE a dans le ventre – d’abord dans mon coin, puis en compagnie d’un développeur. On m’a avant tout demandé de compléter le tutorial, qui explique principalement les mécaniques liées à la composante rogue-lite du soft, mais qui possède aussi quelques cinématiques en live-action avec une actrice sexy qui explique en vitesse le scénario du jeu (il n’y en a pas vraiment) et qui s’essaye à faire un peu d’humour. Une fois ces cinématiques à l’intérêt discutable passées, j’ai pu me lancer dans ma première partie.

[–SUITE–]

1996 comme année sacrée

Rogue (vraiment) lite
Le jeu contient 4 mondes eux-mêmes décomposés en plusieurs niveaux. Si le premier monde, Icarus, est systématiquement le même, les suivants seront dans un ordre aléatoire. Une fois les 4 mondes traversés, il faudra tuer un boss et la partie sera gagnée. Malheureusement, comme à toutes les sessions de jeu organisées auparavant, je n’ai pu tester que les deux mondes que l’on connaissait déjà : le vaisseau spatial et une sorte de canyon, que l’on avait déjà pu voir durant l’E3.

À chaque début de run, on doit choisir entre trois armes : une automatique, un shotgun et un railgun. Chacune possède un tir alternatif, utilisant une partie du chargeur et permettant de liquider rapidement un groupe d’ennemi. Après quelques minutes passées à dézinguer à tout va, j’avais l’impression d’être littéralement agressé par la direction artistique, particulièrement mauvaise. Si le jeu rappelle sans arrêt qu’il s’inspire de l’année 1996, ça n’explique pas pour autant des ennemis qui ne ressemblent à rien. L’ennemi de base est un type boiteux orange à la gueule carrée, d’autres qui balancent des projectiles (lents) ressemblent à des Predators statiques mal modélisés , il y a aussi des grosses mouches et araignées… mais le plus étrange reste la trappe. Je ne vois pas comment l’appeler autrement, puisqu’il s’agit concrètement d’une trappe fixée au décor. On les trouve sur les murs, à balancer des jets d’acide faisant des dégâts au contact. Outre que faire d’une trappe un ennemi est plutôt étrange, c’est également compliqué de savoir où il faut tirer précisément pour la vaincre. Les ennemis ne sont donc pas rétro, mais plutôt moches et à l’inspiration douteuse. Mais soit. Pareil pour l’interface beaucoup trop chargée d’informations pas claires et mal réparties sur l’écran. Soit.

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« Tue-moi, pitié. »

Une fois qu’on parvient à faire abstraction de leur apparence, on s’aperçoit que les ennemis répondent à des comportements systématiques : ceux qui te foncent dessus sans réfléchir, ceux qui restent à l’arrière pour te canarder, ceux qui balancent de la pisse d’en haut et enfin ceux qui se trouvent au plafond, capables d’effectuer des sauts pour attaquer le joueur. Et c’est à peu près tout, du moins pour les deux mondes que j’ai pu voir. L’IA se contente en règle générale de poursuivre le joueur, forçant l’utilisation constante, voire abusive, du tir alternatif qui résout la plupart des situations. Ce choix, bien entendu délibéré, encourage le joueur à sauter au-dessus des ennemis (ce que l’on se retrouve à faire en permanence) et à courir dans tous les sens. Tout cela est servi par un feeling global plutôt bon, mais sans plus. On n’a pas cessé de me répéter « c’est rapide hein ? » pour me convaincre de la nervosité du jeu. Malheureusement, si c’est certes plus rapide que la plupart des FPS actuels, on est encore loin d’un feeling old-school où le strafe, justement, permet d’atteindre de très grandes vitesses.

Je n’ai pas retrouvé cette nervosité dans STRAFE, qui ne m’a pas semblé avoir atteint son objectif : s’approcher du feeling de Quake. En rentrant, j’ai justement rejoué à Quake et je me suis senti plus rapide, plus excité, plus apte à parcourir l’espace… tout le contraire de mes deux heures de jeu sur le FPS de Pixel Titans. J’étais d’ailleurs à deux doigts de rendre la bière qu’on m’a offerte pour demander un café à la place, histoire de pouvoir tenir jusqu’à la fin du niveau.

Sang pour Sang Pur Jus

Un framerate également procédural
La version à laquelle j’ai joué était loin d’être stable. Pixel Titans jurent que cela sera réglé à la sortie, puisqu’ils concentrent tous leurs efforts désormais sur l’optimisation. En attendant, j’ai souffert de nombreuses pertes de FPS tout au long de ma session de jeu, garanti 30 images par seconde.

Mais je ne serai pas mauvaise langue, j’ai pris plaisir, au début du moins, à démembrer les ennemis et maculer les salles de leur sang. La technologie Über-gore, comme ils l’appellent, développée par Pixel Titans, tient sa promesse : foutre du sang partout. On regrette alors le choix des ennemis robotiques qui ne se démembrent pas et ne procurent aucune sensation quand on leur tire dessus, se contentant d’une petite explosion à leur mort. Pourquoi ne pas avoir fait uniquement des ennemis qui se démembrent pour pleinement profiter du gore ? La question m’a malheureusement échappée lorsque j’ai pu parler à un des développeurs.

D’autant plus que si c’est satisfaisant dans un premier temps d’apprécier la quantité de sang déversée, au bout d’une demi-heure on n’y prête plus vraiment attention. Toujours le même problème : trop peu de variété. On démembre la tête, les bras, les jambes et c’est tout. Si certes le sang coule à flot, il ne s’en dégage pas une réelle sensation de puissance. On a juste l’impression d’ouvrir un pot de peinture rouge, mais pas que l’on retire un bras au shotgun. La variété, voilà la grande lacune que j’ai pu apercevoir dans STRAFE. En espérant que les plus de 30 armes et 20 ennemis promis dans la version définitive sauront me contredire.

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TUER TUER TUER

Par sa volonté de faire du rogue-lite, on se retrouve très rapidement à faire toujours la même chose. En cause, une génération de niveaux pas assez poussée, qui choisit des salles au pif et les assemble. Si le développeur avec qui j’ai parlé s’accorde à dire que DOOM, une des inspirations de STRAFE, possède un level-design génial, ils ne souhaitaient pas faire un labyrinthe où l’on se perd sans arrêt. Le sang permet d’ailleurs d’éviter de tourner en rond, servant à identifier immédiatement si on s’est déjà rendu quelque part. En théorie. Dans les faits, je me suis retrouvé une tonne de fois paumé à me demander où aller. Pour avoir observé d’autres jouer, j’ai constaté que c’était le cas de tout le monde. Alors si les niveaux proposent de temps en temps une verticalité intéressante, où l’on peut sauter d’une plateforme à l’autre, ces quelques bons éléments sont pour l’instant beaucoup trop rares.

Les bonnes intentions ne suffisent pas

Au final, si le level-design n’est pas très bon, si le feeling est moyen, si les sensations de tir le sont aussi et qu’une fois vaincu le boss final on recommence de zéro, on se demande qu’est-ce qui pousserait à retourner sur STRAFE après y avoir joué une après-midi. Peut-être que la seconde partie si mystérieuse est excellente, ou que le mode speedrun saura apporter satisfaction chez les amateurs. Mais hormis cela, STRAFE sera certainement ce petit jeu gore que l’on lance de temps en temps pour se détendre. Il n’est pas fondamentalement mauvais, mais encore très loin d’être bon.


La sortie de STRAFE est fixée au 28 mars sur Steam, PlayStation 4 et Mac.

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