mini 2004 11 23 BOS9Paris. Nous étions lundi. Un lundi d’automne, un sale lundi d’automne. Il pleuvait. Oh, pas grand chose, une petite bruine. Une petite bruine qui s’insérait dans vos vêtements. Les traversait. Vous pénétrait. Nicolas et moi avions rendez-vous rue de Charonne. Nous devions rencontrer un développeur de jeux vidéo, il allait nous présenter son nouveau projet. Nous avions massacré le précédent. Dans mon sac, mes armes étaient à portée de main. À tout hasard.

Finalement, nous avons bien rencontré Kylotonn et nous avons passé près de 3 heures à discuter de Bet on Soldier et de jeux vidéo. Et nous avons été agréablement surpris. Et nous sommes repartis plutôt contents. Car s’il ne sera probablement pas le plus beau jeu de 2005, Bet on Soldier a pour lui un univers original et un paquet de bonnes idées.[–SUITE–]Dans Bet on Soldier, on joue un brave bleubite dans un monde en guerre depuis des décennies. On joue un militaire qui participe un peu malgré lui à un reality-show mondial, dans lequel on voit des soldats ennemis s’entretuer. Et on joue du coup un grosbill lourdement armé et bien protégé à l’aide d’une armure. Mais avant de parler gameplay, concentrons-nous un instant sur les influences du jeu et ses origines.

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Roman Vincent fait semblant de travailler

Kylotonn, qui développe le jeu, a été fondé par Roman Vincent, un ancien de 4X Studios. 4X Studios, c’était Iron Storm, un jeu uchronique proposant une Grande Guerre durant depuis des décennies. Le jeu était loin d’être une réussite, principalement à cause de gros (gros gros) bugs. Et malgré les influences revendiquées pour le jeu, soit des mods comme Natural Selection, on ne peut s’empêcher de remarquer comme Bet on Soldier ressemble à son grand frère : univers proche, des niveaux pleins de tranchées… pour un peu, on aurait l’impression que Kylotonn avait envie de terminer ce qui avait été commencé avec Iron Storm. Et Unreal Tournament, auquel on a pu le comparer dans nos news ? Et Counter-Strike, auquel des armes comme le bouclier font penser ? Foin de tout ça, malgré les apparences, Bet on Soldier en est loin, bien loin.

Dans Bet on Soldier, que ce soit en solo ou en multi, on lance des défis à des ennemis. Oui, des défis, un terme qui nous semble plus adéquat que « paris ». Somme toute, l’on ne fait pas réellement de pari dans Bet on Soldier. Commençons par le solo, qui occupe actuellement les efforts des développeurs. En solo, donc, on défie au début de chaque mission un ou plusieurs ennemis (les B.O.S., auxquels il ne manque qu’un « S » pour qu’on devine qui ils sont) et l’on affecte à chacun de ces défis une somme d’argent. Avec l’argent restant, on s’achète ensuite des armes (qu’on garde durant toute la mission) et une armure. En pleine partie, chaque ennemi tué (et pas seulement ceux que vous défiez) vous rapporte de l’argent. Les ennemis que vous avez défié vous rapporteront évidemment bien plus, pour autant que vous les abattiez dans le temps imparti (car eh, c’est un reality-show). Ça a l’air tout simple comme ça, mais c’est que j’ai oublié de vous parler d’un léger détail : les armures.

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Ceci n’est pas Iron Storm

Les armures se composent de multiples pièces : tant qu’une pièce est encore en place, tout va bien. Mais dès qu’une partie de l’armure saute, vous risquez le pire : ainsi, si vous n’avez plus d’armure aux jambes et qu’un ennemi vous aligne dans les guiboles, vous terminerez la mission en boitant (si tant est que vous surviviez). Heureusement, on peut réparer son armure contre espèces sonnantes et trébuchantes dans des distributeurs situés un peu partout sur les cartes. Hélas, votre santé ne pourra elle plus augmenter jusqu’à la fin de la mission, car le jeu ne contient aucun medipack. De même pour les munitions : il vous faudra les acheter à un distributeur. Tout ça vous rend assez résistant, mais il en va de même pour les ennemis : même le troufion de base a son armure. L’abattre sera donc plus long qu’on aurait pu le penser. Quant aux B.O.S., ces ennemis que l’on peut défier, ils ont eux droit à des armures spéciales. On a heureusement droit en début de mission à une description de leurs points faibles.

Pour rendre le tir sur armures plus facile, Kylotonn a eu une excellente idée : ajouter à la droite du viseur un indicateur de l’état de l’armure de l’ennemi. Avec les dommages localisés, il est ainsi aisé de profiter des faiblesses de l’armure du soldat d’en face. Si on a besoin d’aide, on peut aussi louer en début de mission les services de deux mercenaires dirigés par l’IA. On pourra leur donner quelques ordres sommaires au besoin. Côté armes, il y a bien entendu les classiques, mais aussi quelques nouveautés : un bouclier au travers duquel on peut tirer ou encore des grenades hallucinogènes, à l’acide et explosives. Les grenades peuvent aussi être utilisées avec une sorte de lance-jet, ce qui donne alors des jets de produits illicites, d’acide ou de grosses flammes. Rigolo.

mini 2004 11 23 BOS3Nous avons pu jouer à la démo E3 du jeu, qui, bien que datée, était plutôt amusante. Mais nous avons aussi vu de nombreuses autres maps en cours de création : un immense niveau en Alaska avec un cargo échoué sur la banquise ; une église cubaine transformée en champ de bataille ; la place d’une ville cubaine détruite par l’impromptue présence d’un Tupolev 27 encastré dans la mairie… tout n’était pas texturé, loin de là, mais ça rend déjà pas mal. Nous avons aussi pu voir rapidement à quoi ressembleront les exosquelettes, qui seront en quelque sorte les véhicules du jeu : l’inspiration Matrix n’est pas loin. On distinguera deux types d’exosquelettes : ceux qui serviront pour le transport et les exosquelettes de combat. Il va de soi que l’on pourra s’en servir soi-même. Ces machins font tout de même dans les 5 mètres de haut. Ils ne sont hélas pas encore intégrés au jeu mais devraient offrir un peu de changement de solo. On a aussi pu voir un hélico à tête de moustique, mais il nous a été précisé qu’il ne sera pas pilotable et ne sera là que pour mettre un peu d’action dans certaines missions.

mini 2004 11 23 BOS6Le solo devrait durer une quinzaine d’heures (plutôt une dizaine en mode facile) et proposer une vraie campagne, même si l’histoire, dont nous avons eu un succinct résumé, n’en sera peut-être pas le véritable intérêt. On devrait en tout cas se balader entre l’Alaska (Winter is coming), Cuba (et ses 40° à l’ombre) et l’Europe (et sa pluie). Côté IA, nous n’avons pu voir que la version de mai dernier : depuis, Kylotonn s’est mis au middleware et a fait l’acquisition du moteur d’IA de Kynogon, plus connu sous le nom de Render-IA et partie intégrante du Renderware de Criterion. De même pour le moteur physique : après une tentative de développement d’un moteur interne, Kylotonn a intégré Novodex, le moteur physique qui sera utilisé dans les futurs jeux à base d’Unreal Engine 3.

Le moteur physique devrait lui se retrouver dans le multi, contrairement à l’IA, puisque le jeu ne proposera pas de bots. Les physiques devraient d’ailleurs être un peu plus poussées qu’un simple jeu de bidons et de caisses : les objets projetés à grande vitesse contre le joueur pourraient abîmer sa belle et rutilante armure, nous a confié un développeur.

mini 2004 11 23 BOS4Pour revenir au multi, le principe sera assez similaire au solo, avec des défis contre des adversaires online. Le teamplay sera toutefois largement favorisé. Bon, c’est facile à dire, on sera forcément réparti en équipes. Avant chaque manche, on choisira sa classe (sniper, armure lourde, etc) et on pariera sur un ou plusieurs joueurs adverses (dont on voit la classe et l’armement). Le but est bien entendu de remporter ses défis, mais aussi de faire gagner l’équipe. Dans tous les cas, on gagne des thunes. À terme, Kylotonn aimerait bien pouvoir fournir une vraie base de données sur chaque joueur, avec toutes ses stats, un classement mondial, des ligues online… mais ça dépend un peu du succès du jeu et du budget qu’ils peuvent y consacrer. Nous n’avons pas pu voir le mode multijoueur, qui est encore bien loin d’être finalisé : le jeu lui-même doit passer en alpha avant Noël et sortir en juin 2005. Entre temps, Kylotonn aimerait bien organiser un bêta-test afin de tweaker le multi. Rien de définitif pour l’instant, toutefois.

Je n’ai pas encore parlé du moteur 3D ni des graphismes du jeu : ce ne sont hélas pas les points les plus marquants du jeu, même si un soin particulier a été apporté aux cartes et aux models. Les textures ont un petit côté crade totalement revendiqué. Ça donne un look assez spécial au jeu mais qui rend assez mal sur les screenshots. En mouvement, ça passe en tout cas plutôt bien. Enfin, mieux que sur les screenshots, disons. Le moteur 3D semble lui capable d’afficher un gros paquet de polygones et des shaders dans tous les sens mais ça ne se voit pour l’instant pas trop (on attend de voir ce que ça donne sur les prochaines versions de Bet on Soldier).

Le moteur 3D en question a été développé en interne chez Kylotonn. Le jeu est un petit ovni dans le paysage vidéoludique: il a été complètement autoproduit (ce qui le place au même niveau que des raretés comme DOOM 3, Half-Life 2 ou Duke Nukem Forever) et Kylotonn n’a donc aucune pression de la part de ses distributeurs (Focus Home Interactive en France). Accessoirement, ça leur permet de garder la propriété du jeu, contrairement à leur précédente expérience (Iron Storm) chez le très mort 4X Studios. Ils ont aussi pu avoir une longue préproduction : lancée début 2003, elle n’a laissé la place à la production que plus d’un an plus tard, en mars 2004. Et mine de rien, avec leur petit projet de FPS pour hardcore gamers développé dans leur coin, les Parigots de Kylotonn ont attiré l’attention de distributeurs des quatre coins du monde. Du coup, Bet on Soldier, projet à petit budget, dépasse désormais d’un quart le budget d’Iron Storm. Et une adaptation Xbox pourrait peut-être bien voir le jour.

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Un dernier point avant de conclure : Kylotonn songe à sortir des outils pour modder Bet on Soldier. Évidemment, le nombre de ces outils sera proportionnel aux ventes du jeu. Chez Kylotonn, on n’exclut pas non plus de sortir un SDK plus complet. Oh, et des mission packs gratuits sont également à prévoir.

Au final, niCO et moi sommes plutôt satisfaits de ce que nous avons vu. Nous venions plein d’interrogations et la tête un peu dans le flou sur le concept du jeu et nous sommes repartis avec l’impression d’un projet certes toujours en plein développement, certes pas forcément très impressionnant graphiquement, mais avec un gros travail de design derrière, plein d’idées et surtout un gros potentiel ludique.

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